L'église romane de Cléry
L’église romane de Cléry, bâtie au XIIe siècle, témoigne du riche passé religieux de cette commune savoyarde. Elle est caractérisée par son architecture typique de l’art roman, avec des arcs en plein cintre, un clocher massif et des détails sculptés. Au fil des siècles, l’église a subi des rénovations, mais elle conserve son charme d’origine et reste un lieu central pour les habitants. Située dans un cadre pittoresque, elle fait partie intégrante de l’héritage historique et spirituel de Cléry.
Consacrée depuis huit siècles et demi, cette église est typique de l’art roman savoyard et homogène, ce qui est exceptionnel en Savoie marquée par d’autres périodes architecturales plus récentes.
L’église romane est installée sur un replat au flanc méridional des Bauges, près de la route venant d’Albertville au col de Tamié et continuant en direction d’Annecy. Elle domine la combe de Savoie.
Le monument comporte une série d’originalités valant la visite intérieure.
1 – Histoire d’une église romane en Savoie
L’édifice actuel paraît avoir succédé à une première église présumée du VI ème siècle, en raison notamment de sa dédicace à Saint-Jean-Baptiste. On ignore actuellement ses éventuelles transformations carolingiennes.
Pour améliorer la vie paroissiale, les Chanoines réguliers de Saint-Augustin vinrent s’installer à Cléry pour créer un prieuré au début du XII ème siècle; le premier prieur connu est cité dans la fondation de la proche abbaye de Tamié en 1132. Alors fut construite l’église que vous visitez. Les chanoines réguliers, vêtus de noir et blanc, venaient desservir un groupe de paroisses et assurer l’enseignement, tout en obéissant à la règle monastique. Ils donnèrent un vif élan à la spiritualité et à l’instruction des laïcs dans ce pays qui avait eu un très long passé païen.
Malheureusement l’archevêque de Tarentaise, dont ils dépendaient, les envoya à Moûtiers vers 1265 et les remplaça par des chapelains aux mêmes fonctions vis-à-vis des laïcs. Cette nouvelle organisation se relâcha depuis la seconde moitié du XV ème siècle et le déclin fut tel au siècle suivant que le cloître servit de carrière de pierre. L’église seule fut sauvée par une restauration en partie baroque entre la fin du XVII ème et le milieu du XVIII ème.
En 1793 l’invasion des révolutionnaires aboutit à la destruction de la haute flèche qui fut remplacée vers 1819 par le plus modeste clocher actuel qui rend l’église trop trapue. D’autres restaurations s’imposèrent durant le XX ème siècle.
2- Architecture intérieure et plan de l’église romane :
Bien orientée, l’église paraît au premier abord très simple:
– une grande nef à trois travées rappelant la Sainte Trinité,
– d’étroites nefs latérales pour des processions en file,
– un transept dissymétrique en raison de l’ancien accès au cloître à gauche,
– une abside semi -circulaire,
– en voûtement d’origine, l’arc brisé concurrence le plein cintre en cette fin de période romane.
– la classique coupole sur trompe indique la place du clocher sur la croisée du transept.
Pourtant trois originalités frappent les visiteurs dans cette œuvre des années 1130/1140 :
– L’inclinaison des colonnes de la nef et même des piliers du transept à un degré moindre: effet d’un manque initial de contreforts ou, en l’absence de désordre architectural d’ensemble, plutôt effet voulu pour recentrer l’attention vers le maître autel ? C’est vers lui que monte symboliquement le sol depuis l’entrée. Il reste que les colonnes sont droites vues du maître autel.
– Les Oculi, ouvertures rondes pour donner plus de lumière venue du ciel, ont été audacieusement placés dans le clocher et non réservés aux bras du transept.
– La compensation de la dissymétrie du transept. Le bras droit est bien constituée par la chapelle Notre-Dame. Mais le bras gauche ne pouvait pas se développer en raison de la porte du cloître, maintenant visiblement uniquement de l’extérieur côté nord et caché à l’intérieur par l’aménagement tardif de la chapelle actuelle de Saint Joseph. D’où un décalé à gauche de l’abside, la chapelle Saint Jacques de Tarentaise : on y accédait au Moyen Age dans l’axe de la nef latérale gauche.
3 – L’autel roman : une pièce rare de l’église romane de Cléry
Il était à l’origine placé au centre d’un chœur alors surélevé de façon que les chanoines l’entourent en demi-cercle, lors des messes. Sur ce bloc marbre gris vert ont été sculptés des pilastres ornés d’entrelacs (vieux symbole d’éternité celtique) s’achevant par des têtes d’animaux selon l’usage roman.
Selon l’interprétation générale, l’angle droit le mieux éclairé (symbole de lumière) montre le tombeau du Christ, encadré par des anges de la Résurrection et par des Saintes Femmes portant des aromates.
Au fond à gauche, une tête d’homme aux traits précis et de même à droite une Dame couronnée représentent sans doute les donateurs. Cette œuvre exceptionnelle date à peu près de l’érection de l’église et illustre la pédagogie par l’image lors de la Réforme du XII ème siècle à partir des idées lancées par l’ordre de Cluny.
– Le retable baroque, établi au milieu du XVIII ème siècle d’après les archives paroissiales, a crée une série de modifications: abaissement du chœur, recul de l’autel roman au fond de l’abside, fermeture de la verrière centrale, abandon des piscines liturgiques sous la fenêtre de droite, percement aussi d’une porte donnant sur la sacristies établie dans l’ancienne chapelle Saint-Jacques.
Le retable lui-même est centrée sur le Christ ressuscité (tabernacle) et sur Dieu le Père accueillant tous les hommes de bonne volonté ! Côté gauche apparaît le Saint patron de la paroisse, Saint Jean -Baptiste, d’abord en pied, et lors de sa décapitation avec remise de sa tête par Salomé (médaillons bleus du haut). Secondairement, une série de coquilles (en haut du retable) rappelle Saint-Jacques, privé de sa chapelle désormais. L’esprit de la Contre Réforme aux effets durables pourraient bien être marqué à droite par Saint-François de Sales, le grand évêque savoyard du comportement chrétien au quotidien par la prière et par les œuvres. Différentes, les deux réalisations se rejoignent pour dire l’appel lancé à tous les hommes de Dieu Vivant, du Dieu de l’Amour victorieux de la haine et de la mort.
4- Les chapiteaux
Ils fournissent le décor depuis la destruction des peintures murales par les fâcheux « blanchissements» d’un large XVIII ème siècle. Les chapiteaux en place dans l’église offrent une symbolique centrée sur la fleur de lys et sur la sphère retenue. D’autres, posés à l’entrée du chœur, viennent sans doute du cloître: à gauche le chapiteau des têtes peut rappeler des procédés datant de la première église ou même des traditions gauloises dans un pays de très vieille occupation humaine; à droite au contraire le chapiteau au nom et aux armes d’Edouard de Savoie (XIV ème siècle) souligne la forte présence de la Maison de Savoie aux abords des proches routes de Maurienne vers le Mont Cenis et de Tarentaise vers le Petit Saint-Bernard. On pourra aussi intéresser à des œuvres plus récentes près de l’autel de Notre Dame.
5- L’extérieur de l’église romane
Le portail d’inspiration antique révèle bien la Renaissance du XIIème siècle, malgré un décor de nos jours très réduit. En face du portail, les traces d’une tour encastrée dans une maison et d’autres indices révèlent que l’église et son cloître se trouvaient dans un ensemble modérément fortifié (par des Cléry, l’archevêque de Tarentaise ou par le Comte de Savoie), à une date non déterminée. Toutefois, on se demande si le proche Châtelard de Clermont n’a pas fourni un meilleur site de défense à toute la population de Cléry, environ 500 habitants vers 1330.
Sur le côté nord de l’église, la porte du cloître et un vaste terrain, entamé par l’actuel tracé de la route, indique bien l’emplacement du cloître et du bâtiment attenant, ce que l’on, peut se représenter encore grâce à l’abbaye d’Abondance en Chablais ayant relevé du même ordre. Ce cloître, comme l’église, abritait des tombeaux: voir le masque mortuaire scellé dans le mur près du portillon coté mairie.
Au chevet de l’église, couvert de lauzes, on peut examiner le clocher à baies romanes et se souvenir de sa haute flèche.
Le panorama général englobe, les Bauges, le Beaufortain et le Mont-Blanc, le massif du Grand Arc séparant Tarentaise et Maurienne. En bas dans le fond de la Combe de Savoie, le château de Sainte-Hélène des Milliers (en face) et la ville de Conflans sur Albertville à gauche rappellent que de nombreux monuments et sites médiévaux vous attendent à peu de distance de Cléry
Pour la visite de Saint-Jean-Baptiste de Cléry, vous pouvez prendre contact avec la mairie via ce formulaire :
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L'abbaye de Tamié
L’Abbaye de Tamié, fondée en 1132 dans le massif des Bauges en Savoie, est une abbaye cistercienne nichée dans une vallée isolée. Depuis sa création, elle a été un lieu de vie monastique dédié à la prière, au travail et à l’accueil. Malgré des périodes de troubles, notamment pendant la Révolution française, l’abbaye a résisté au temps et a conservé sa vocation religieuse. Les moines qui y vivent produisent aujourd’hui le célèbre fromage de Tamié, perpétuant la tradition de travail manuel et de vie contemplative chère aux cisterciens.
Crédit photo : L’abbaye de Tamié en images